La peur est la petite mort qui conduit à l'oblitération totale. La peur tue l'esprit.
J'affronte ma peur. Je lui permets de passer sur moi, au travers de moi.
Et lorsqu'elle sera passée, je tournerai mon œil intérieur sur son chemin.
Et là où elle sera passée, il n'y aura plus rien. Rien que moi.

mardi 9 avril 2019

Sortir de l'amour-haine (VIII)

De la vie en société, de la mauvaise influence réciproque,
Paul Diel relevait que :
Les accidents de la vie, les excitations provenant du milieu, deviennent des irritations
mutuelles du fait que les autres aussi sont de faux motivateurs

et de faux justificateurs de leurs actions.
C’est précisément la faute essentielle de chacun.
(…)
Tous les ressentiments sont le produit de l’ambivalence fondamentale :
amour-haine
.

(…)
Destructeurs de l’unité psychique, les ressentiments sont caractérisés
par leur duplicité ambivalente : l’amour exalté de soi (vanité)
est lié à la haine exaltée de soi (l’excès d’autocondamnation coupable).
Cette duplicité envers soi-même est complétée d’une duplicité à l’égard d’autrui :
l’inculpation excessive d’autrui (accusation),
contrastée par l’amour exalté d’autrui (pseudo-altruisme sentimental).

Voici une explication succincte de la méthode du « calcul Ψ »,
avec les quatre angles abordés ci-dessus (marqués en gras) :
La vanité n’est autre que la culpabilité refoulée,
car ne pas voir ses fautes, c’est être vaniteux.
De la disculpation vaniteuse de soi résulte infailliblement
l’inculpation excessive d’autrui.
Elle se décompose à son tour ambivalemment,
car le reproche accusateur contient inexorablement la plainte sentimentale.
Il est impossible de comprendre le fonctionnement pathologique du psychisme
– sa progressive disharmonisation –
sans tenir compte de l’amour-haine de soi et d’autrui,

d’où s’ensuivent quatre groupes de ressentiments : culpabilité refoulée,
vanité refoulante, accusation d’autrui et sentimentalité hypersensible.
Ces quatre groupes fondamentaux constituent les catégories de la fausse motivation,
car chacun de ces groupes catégoriels se scindera à son tour en ressentiments multiples,
de sorte que la décomposition – tant qu’elle n’est pas élucidée –
se poursuit inlassablement sous l’emprise des ruminations imaginatives.

L’erreur essentielle découle donc d’une relation biaisée et malsaine entre moi-je et Soi.
De cette erreur de base proviennent nos difficultés, un profond sentiment d’insatisfaction,
ainsi que des troubles, anxiétés, nervosité, symptômes pathologiques, etc.
Cette erreur fondamentale fausse notre regard (sur soi et sur le monde),
ainsi que nos jugements restant trop subjectifs, ce qui cause de faux raisonnements :
Le comble de la fausse interprétation, ce sont les délires psychotiques.
Ils expriment tous les catégories de la fausse motivation :
- délire de grandeur (vanité),
- délire de persécution (culpabilité),
- délire de revendication (accusation),
- délire d’amélioration (sentimentalité).


Paul Diel revient à l’introspection qui implique une « observation intime » (auto-observation).
Voici un axiome concernant la vie psychique :
Ce postulat se laisse formuler comme suit :
« le fonctionnement intime de la psyché est le même pour tous les hommes. »
Seuls varient d’individu à individu la constellation dynamique (désirs, volitions,
pensées, etc.) et le degré d’intensité de l’intime situation conflictuelle.

(…)
Non seulement le postulat est valable, mais il a des corollaires.
L’un stipule qu’en raison de sa validité générale, voire de sa légalité,
« ce postulat est garant de l’objectivité en psychologie. »
Il importe d’insister sur l’importance de cette conclusion.
Le second corollaire :
Le postulat d’un fonctionnement intime commun à tous les êtres humains
inclut le droit de « conclure, à partir de son propre fonctionnement intime,
sur le fonctionnement intime de la psyché d’autrui. »
Le fonctionnement intime se trahit par les actions.
Il s’agirait donc de remonter à partir des actions vers les motifs intimes
souvent considérés comme inavouables.
(…)
Ce corollaire expliquerait-il l’aversion généralisée contre l’investigation intime ?

Comme déjà signalé, l’auteur reconnaît un danger à l’introspection :
entreprendre des introspections volontaires et méthodiques à partir du faux-moi
reste peine perdue, puisque le faux-moi évolue excessivement dans la subjectivité
et que l'imagination de la personne est plus ou moins morbide.


Ce qui va suivre sonne telle une mise en garde vu ce qu’il se passe actuellement
notamment avec les smartphones et les assistants personnels IA.
Paul Diel a écrit concernant le rejet officiel de l’introspection :
La violation du for intérieur apparaît dans cette optique
comme une entreprise impardonnable
.
Et pourtant,
ce que je tiens à me cacher, ce que l’autre tente de cacher,
qu’est-ce sinon le fait que certains de nos motifs ne supportent pas la lumière du jour

et s’opposent ainsi à l’impartialité et à l’observation objective ?
La raison en est qu’ils trahissent nos imperfections.
L’homme aimerait donc par-dessus tout s’imaginer être parfait.
Ne pouvant l’être, il s’obstine à vouloir le paraître
(et d’autant plus lorsqu’il a un enfant).

Ainsi se crée un décalage entre le vrai et le faux, entre la vérité et l’erreur.

Paul Diel rappelle la définition de l’objectivité,
que la plupart des comportementalistes et psychologues cliniciens ne reconnaissent pas :
Il est d’usage de qualifier du terme « objectif » l’observation des objets extérieurs.
Dans cette acception, la psychologie – afin d’assurer sa valeur objective –
tente de traiter l’homme et son psychisme (le sujet par excellence) comme un objet exclusivement observable de l’extérieur et de n’en étudier que le comportement.
On parle ainsi de méthodes « objectives » (expérimentale et clinique).
Il est indéniable que, selon l’usage général du langage, le terme « objectif »
a une tout autre signification, incompatible avec son emploi en psychologie classique.
Le terme ne vise pas un méthode d’investigation,
mais une attitude intérieure, une qualité psychique :
l’absence d’aveuglement affectif.
(…)
L’objectivité, jamais entièrement atteinte, est un idéal directif.
Il ne peut être approché qu’au prix d’un constant effort d’autocontrôle,
perfectible au long de la vie.

À considérer, puis à réfléchir et méditer :  
La surconscience ne spécule pas et ne calcule pas.


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2 commentaires:

  1. Eric,
    Passionnante, questionnant, inquiétant presque tellement c'est dans le mille.
    @+

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